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Origine de la musique indienne

Il est nécessaire, pour comprendre la musique indienne, d'avoir en tête que pour un Indien, la musique a une origine divine. Effectivement, selon la mythologie indienne c'est par la musique que Brahma a créé l'univers. Le musicien doit donc se trouver en état de complet abandon lors d'une éxecution en vue de se trouver en fusion avec le principe fondamental de l'Univers, qui est son musical.
Au-delà de ces considérations d'ordre métaphysique, l'origine de la musique classique indienne remonte aux temps védiques. Les hymnes védiques les plus anciens étaient chantés en utilisant uniquement trois notes. Entre le XIV° et le XVIII° siècles, l'influence de la musique persanne et moghole au Nord de l'Inde a provoqué la séparation de la musique indienne en deux styles : la musique hindustani au Nord et la musique carnatique au Sud.

Do Ré Mi ? Sa Re Ga ?
Nous parlerons ici essentiellement du système de notation en vigueur dans l'Inde du Nord.

Les swaras
L'octave occidentale ( do ré mi fa sol la si do ) est appelée ashtak dans la musique indienne. Mais ce terme est peu employé car les musiciens indiens parlent plutôt des sept notes non répétées ( do ré mi fa sol la si ) soit saptak, ( asht signifie huit et sapt signifie sept ).
Les sept notes de la saptak sont les suivantes :
SA RE GA MA PA DHA NI

et qui correspondent à peu près aux sept degrés de l'échelle occidentale. Leur noms viennent des mots Shadjam (Sa), Rishabam (Ri ou Re), Gandharam (Ga), Madhyamam (Ma), Panchamam (Pa), Dhaivatham (Dha) et Nishadam (Ni).
Comme dans l'échelle occidentale des subdivisions entrainent l'apparition de notes supplémentaires utilisables par le musicien ( ce sont les touches noires du piano par exemple ). L'ensemble des notes jouables par le musicien ( touches noires et blanches du piano ) sont les swaras. Il s'agit de :
SA RE RE GA GA MA MA' PA DHA DHA NI NI SA

Les notes soulignées indiquent un bémol ( diminution d'un demi-ton environ ) et le MA' indique un dièse ( élévation d'un demi-ton ).
Attention : le fait qu'il y ait douze swaras n'implique pas que la musique indienne soit une musique dodécaphonique comme il est souvent affirmé. Ces douze notes sont aussi présentes sur un clavier occidental et Bach n'a jamais composé de musique dodécaphonique ( çà se saurait... ).

Les thaats
En fait, les musiciens utilisent, comme dans la musique occidentale différents modes ( thaat ).
Dans la musique d'Inde du Nord il y a dix thaat ( modes ) qui sont nommés ainsi :
Bhairava : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Asavari : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Khammaj : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Todi : SA RE GA MA' PA DHA NI SA
Kafi : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Bilaval : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Kalyan : SA RE GA MA' PA DHA NI SA
Pooravi : SA RE GA MA' PA DHA NI SA
Marava : SA RE GA MA' PA DHA NI SA
Bhairavi : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Pour continuer le parallèle avec la musique occidentale, on pourrait dire qu'un raga composé sur le thaat Bilaval correspond à un thème joué en mode majeur.
Remarquons au passage que la musique indienne connait dix modes alors que la musique classique occidentale n'a principalement utilisé que les modes majeur et mineur. Le jazz et la musique contemporaine ont redécouvert l'emploi des autres modes.

Tempérament
Une différence fondamentale entre la pratique musicale indienne et la pratique occidentale est que le swara SA, et par conséquent les autres swaras, n'a pas une hauteur fixée, une fréquence précise. Dans la musique occidentale, toutes les notes occupent une place bien précise dans le spectre des fréquences (le la3 est fixé de nos jours à 440 hertz). Dans la musique indienne, l'exécutant fixe lui-même la position du SA et accorde son instrument à partir de cette note dont il a décidé de la fréquence. Ainsi, un SA, peut tout aussi bien être un do, un sol, un ré bémol ou tout autre chose entre deux degrés de notre échelle occidentale.
Ce fait a pu laisser penser que la musique indienne est une musique microtonale, ce qui est inexact. Elle respecte la subdivision en demi-tons ( les douze swaras ), qui, dans quasiment toutes les cultures, est utilisée, car, la plus à même d'être harmonieuse ( voir théorie des harmoniques, etc... ). La musique archaïque indienne de type védique, à l'origine du système des ragas, n'utilisait que sept mêmes swaras au lieu de douze. Mais ces sept swaras n'étaient pas le résultat d'une division par sept de l'octave mais bien de sept notes parmi les douze de la subdivision en demi-tons. Le chants védiques plus anciens encore n'utilisaient que trois mêmes swaras parmi les douze, certaines musiques chinoises n'en utilisent que cinq, etc...

Gamaka
Pour aller un peu plus loin sur le sujet de la microtonalité, on peut ajouter que selon le raga joué et le caractère qu'il doit développer, l'écart entre les swaras n'est pas toujours le même, y compris pour un même thaat (mode). Les swaras peuvent alors ne pas correspondre exactement à la subdivision naturelle de l'octave (par subdivision naturelle on entend la subdivision résultant d'un rapport simple de fréquences entre les notes et non la subsivision rigoureusement chromatique de notre "clavier bien tempéré"). Cette déviation par rapport à la gamme naturelle s'appelle gamaka et est tenue par les spécialistes comme le coeur et le principe fondamental de l'exécution des ragas.
On peut aussi évoquer le fait qu'il existait autrefois une division de l'octave en un nombre plus important de subdivisions, ou shrutis. La plupart des spécialistes s'accordent sur le fait de l'existence d'une subdivision en 22 shrutis mais d'autres parlent de 24, 44, 49, 66 shrutis ! Mais cela n'est plus d'actualité, tous les musiciens actuels reconnaissant l'existence de douze swaras issus de la gamme naturelle comme il a été exposé plus haut.
LES INTRUMENTS DE LA MUSIQUE INDIENNE.
Les intruments de la musique indienne sont très nombreux. Vu leur diversités, j'ai choisi les plus courants dans la discographie. Les interprètes cités sont ceux qui ont enregistré en tant que solistes

LA VOIX
La voix, dans l'exécution d'un raga chanté est considérée en Inde comme un instrument de musique. A tel point que, bien souvent les paroles sont tout à fait superflues. Le chanteur montre toute sa virtuosité sur une seule voyelle ou chante "sa ré ga ma pa dha ni sa", c'est-à-dire les notes chantées. D'autres fois, lorsque c'est le rythme qui importe, le chanteur utilise des codes rythmiques en guise de parole. Les chanteurs virtuoses utilisent des figures de styles communes au chant classique européen : port de voix, longues tenues, vocalises rapides. Mais d'autres figures de style sont tout à fait propres à la musique indienne et peuvent paraître étranges à l'auditeur novice : des modulations très rapides de la voix qui donnent parfois l'impression de "chevrotement", il s'agit là d'un style de vocalise très virtuose et particulièrement prisé des chanteurs. On trouve aussi des glissements à partir d'une note, le même effet peut être produit avec un instrument à cordes en la poussant du doigt pour obtenir ce glissement vers l'aigu ou en la poussant et la relachant immédiatement pour obtenir un glissement vers l'aigu puis le retour vers la note de base. Cette dernière figure de style montre à quel point la voix peut être considérée comme un instrument de musique.
Interprètes : Mallikarjun Mansur, Bhimsen Joshi, Sheila Dhar, Lakshmi Shankar, Rajan & Sajan Mishra, Sulochanan Brahaspati, Shruti Sadolikar, Aruna Sairam.

LES INSTRUMENTS A CORDES
Le santoor : Instrument d'Inde du Nord, originaire du Cachemire. Il possède plus de 100 cordes tendues sur un rectangle creux et frappées avec deux petits maillets faits de noix.
Interprètes : Shivkumar Sharma
Le sarangi : Instrument à cordes frottées par un arc. Le sarangi a 3 ou 4 cordes principales et 35 à 40 cordes résonnantes !!! Son nom dérive d'un expression signifiant "100 couleurs". Il se joue en faisant glisser le dos des ongles le long des cordes en boyau. Le sarangi est instrument d'accompagnement du chant mais peut être aussi un instrument soliste. Le sarangi n'a jamais joui d'une bonne réputation en Inde car il est associé aux danseuses, donc aux courtisanes. De plus, la difficulté redoutable que représente la maîtrise de cet instrument font que les sarangiyas ( joueur de sarangis ) se font rares.
Interprète : Ram Narayan
Le sarod : Instrument à cordes très ancien ( on en a retrouvé des représentations datant du 1er siècle de notre ère ). Construit d'une seule pièce en bois de tek, sa caisse de résonnance est recouverte de peau et ses 10 cordes métalliques sont grattées à l'aide d'un plectrum en noix de coco. Il possède aussi 15 cordes sympathiques mais n'a pas de frettes. L'instrument a connu plusieurs modifications au cours des siècles pour atteindre sa forme actuelle. Le son du sarod est plus chaud que celui du sitar.
Interprète : Ustad Ali Akbar Khan, Krishnamurti Sridhar
Le sitar : Le plus connu des instruments à cordes de l'Inde, popularisé en Ociident par Ravi Shankar entre autres. Il est utilisé depuis près de 700 ans et est dérivé de la veena. Par rapport à la veena, le sitar a des frettes mobiles et des cordes dont l'ordre est inversé. Il possède 20 frettes et 6 ou 7 cordes à jouer en dessous desquelles sont placées 19 cordes sympathiques. Les cordes sont grattées à l'aide d'un plectrum.
Interprètes : Ravi Shankar, Nikhil Banerjee, Vilayat Khan.
La tanpura : La tampura est l'instrument qui maintient en bourdon constant la tonique dans toute la musique Indienne. Elle possède 4 à 6 cordes. Son rôle est fondamental pour la constitution de l'atmosphère sonore d'un raga. La répétition régulière de microtons définit le champ où va s'opérer l'improvisation du soliste.
La veena : La veena est un instrument ancien qui a donné naissance au sitar et au sarod. La famille des veenas comprends plusieurs instruments comme la rudra veena ou la veena carnatique ( appelée bin ).
Le violon : introduit en Inde il y a près de 450 ans, il a été vite adopté par les musiciens Indiens. Le violon s'avère en effet tout à fait adapté pour respecter les nuances et les éclats de la musique indienne avec la possibilité d'utiliser les microtons et la virtuosité qu'il permet de développer. Il est surtout utilisé en Inde du Sud.
Interprète : L. Subramanian

LES INSTRUMENTS A VENT
Le shehnai : Le shehnai est un instrument à anche double qui s'apparente au hautbois. Il a longtemps été considéré, tout come le sarangi, comme un instrument d'importance mineure dans la musique indienne. Il a longtemps été un instrument de fêtes, ou d'annonce de moments joyeux ( naissance d'un fils, mariage, soixantième anniversaire,... ). De nos jours il a gagné ses lettres de noblesse en montrant qu'il était capable de produire toutes les nuances délicates de la musique indienne. Le jeu du shehnai se caractérise par l'emploi de glissandos entre les notes, de longues tenues sur un seul souffle, de modulations rapide sur une note, de vocalises virtuoses. L'emploi de plusieurs shehnai dans un ensemble est également possible.
Interprète : Ustad Bismillah Khan
La flute : Généralement traversière et en bambou, la flute n'est pas un instrument soliste depuis longtemps. Il a été récemment élevé au rang d'instrument soliste par quelques grands interprètes. Son son mielleux et cotonneux donne un caractère très intime aux ragas.
Interprète : Hariprasad Chaurasia

LES PERCUSSIONS
Le mridangam : tambour horizontal et biface. D'après la mythologie, il a été créé par Shiva. Instrument d'accompagnement surtout utilisé dans l'Inde du Sud.
La pakhawaj : équivalent du mridangam pour l'Inde du Nord. Le côté droit est accordé sur la tonique.
Les tablas : Percussions de la musique Indienne par excellence. Il accompagne la musique chantée ou jouée surtout en Inde du Nord. Composés de deux petits tambours dont celui de droite est accordé sur la dominante ou la sous-dominante et celui de gauche sur la tonique. Ils se frappent aussi bien avec la paume de la main qu'avec les bouts des doigts, céant ainsi une grande variation dans les sons produits. Les passages solistes réclament une grande virtuosité.
Interprète : Zakir Hussain